Espérance
Si un jour vous voyez ce que d’autre ne voit,
Que vos songes vous traînent dans vos limbes,
Que de là-haut viennent à vous les petites voies,
Que votre tête s’entoure d’une lueur de nimbe,
Vous parlerez, sans doute, du fond de vos émois,
Vous rêverez, sûrement, de douceurs éternelles,
Vous sècherez vos yeux, votre âme qui larmoient,
Vous verrez le monde au cœur de vos prunelles.
Si un jour s’en vient comme le vent qui tombe,
Sur votre terre humide trop noyée de chagrin,
Si un jour s’en vient pour éclairer votre tombe,
Que le blé dresse au ciel ses épis et ses grains,
Vous chanterez, je crois, la mélodie joyeuse,
La belle mélopée, le bonheur de chaque être
Vous chanterez, je le sais, que la vie est rieuse,
Vous viendrez, enfin, à mes yeux apparaître.
Si un jour vous marchez de votre pas discret,
Sur les chemins de travers au milieu des vallées,
Que votre ombre glissant sous les arbres sacrés,
Avance au grand soleil sous les rayons étalés,
Je vous verrais venir comme tombé des cieux
Doucement dans ma nuit allumer les espaces,
Alors que monte le cri d’un vent capricieux,
Soulevant la grisaille des nuages qui passent,
J’attends ce jour, comme vous, d’impatience,
Mes pensées élevées au-dessus de mon cœur,
Regardant à ses pieds d’une vague conscience,
L’eau qui s’écoule aux rivières des rancœurs.
En cet instant, dans le soir, où va mon ennui,
Rien n’entoure mon pauvre corps solitaire,
Seules vont les brumes qui dévalent ma nuit,
Nul amour, nul aimée, qu’un grand vide austère.
Si ce jour était là, venant traîner dans ma cour,
Que votre musique grimpait le long de mes murs,
Si vous étiez simplement mon unique recours,
Le dernier sursaut de votre voie qui murmure.
Je serais à vos genoux au bout de mon errance,
Je prierais pour vous, vous qui êtes l’espérance.
