On écoute les mots dire Ce que l’on veut entendre Les mots tendres Qui s’égarent Se font rares On les entend prédire L’amour et le désir Ce que l’on aimerait croire On voudrait les maudire Car on sait, le mot ment Face au temps Il renie ses serments Il dit « haine » Alors même qu’il vénère Se déchaine Et demain va maudire les moments Qu’aujourd’hui il espère Car le mot est mouvant Il est ombre et lumière Si souvent émouvant Il change de repères Le mot erre
S’il sait se faire intense Le mot lasse Le mot s’use Et cesse d’avoir un sens Pour garder sa puissance Le mot ruse Se redresse Et nous grise de promesses On connait la douceur Des mots quêtes Qui recherchent l’âme sœur Tous ces mots de poètes Ces mots cœurs si habiles Qu’ils nous leurrent Puis deviennent des mots biles Qui écœurent Des mots nourris de haine, de rancœur Des mots cris de moqueurs Des mots crus Mots de rues Des mots mis en colère Qui se cabrent et qui ruent Ces mots râlent Et lacèrent La morale
Comme le sang les mots filent Se vident de leur essence Ils deviennent des mots creux Cèdent la place au silence On se fait sourds aux mots À leurs maux Aux morsures Des mots durs Qui blessent et parfois tuent Des mots d’esprits obtus Acariâtres et aigris