J’ai souri mes quinze ans à l’émail de tes dents A tes yeux de filou, à ta frimousse fine Quand tu as soulevé ma robe en mousseline Je pressentais déjà de ton désir d’amant
J’ai goûté mes vingt ans à ta peau mordorée Aux gouttes emperlées de ton apéritif Et des juteuses baies mordues dans les massifs Tu me fis le serment de tôt me marier
J’ai fleuri mes trente ans à l’espoir de ta graine Quand elle a engermé notre petit bourgeon Puis j’ai vu tôt venir la belle quarantaine Qui loin de m’isoler m’a attaché ton nom
De cinquante à soixante au balancier du temps Les saisons ont glissé si vite si furtives Mais l’émotion teintée dans nos prunelles vives Nous a fort préservés d’hivers intempérants
Trois décennies plus tard nous étions amoureux Tout comme au premier jour, et si l’orge a flétri Les sillons des genêts à nos cœurs langoureux N’ont ridé notre amour qui toujours a mûri
La rose s’est couchée aux chants de Maldoror Quand le gel l’a saisie aux moissons du bambou Ont fané nos cent ans à l’ombre de nos morts Nous nous sommes aimés jusqu’au bout.. jusqu’au bout…