L’océan au lointain berçait sa vague lente Aucun autre décor ne résonnait plus fort Que mon cœur effrayé par sa houle insolente Quand au petit matin l’amour quitta le port
Reviendrait-il un jour amarrer à ma peau Les colliers de tiaré frisés d’ambre exotique ? Penserait-il à moi à bord de son bateau ? Me rapporterait-il des rubans d’Atlantique ? Je me sentais si peu ! J’étais toute petite Face à l’immensité de ses flots en muraille Prisonnière à jamais de son crêt stalactite Souillée comme une épave, une morne ferraille ! J’apprivoisais le temps en caressant l’espoir Les pieds nus sur le bois du vieil embarcadère Mon regard s’attachait aux lames de mémoire Mais mon âme dansait toujours en bayadère Je me sentais si peu ! Je n’étais presque rien Je priais le retour de mon beau capitaine Dans ces nuits éprouvées à distendre le lien Des peines nourrissant notre claire fontaine La sirène au lointain gouaillait mon affliction Lorsque de sa musique échappée d’une étoile Le vent du Nord toussa contre-malédiction Faisant barrer vers moi, une esquisse de toile Je me pris d’imiter la joie d’une mouette Pour rallier la coque à mon rire perçant Et je vis s’agripper la frêle goélette Frissonnante d’embruns sur mon coquet versant Ce n’était pas de l’or qu’elle portait en cale Pas de rubis non plus, ni saphir, ni diamant Pourtant de ce trésor conquis lors d’une escale Brillait le plus précieux : mon merveilleux amant ! Je me sentais beaucoup ! J’étais devenue grande ! L’univers à mes pieds en était ridicule ! Et ma ferveur doublée de ma folie gourmande Avait mille fois plus de force qu’un Hercule !
L’océan au lointain berçait sa vague lente Aucun autre décor ne résonnait plus fort Que mon corps engrossé par sa houle insolente Quand au petit matin ... l’amour revint au port !