Bien avant toi, sais-tu que je passais mes nuits A coucher sur papier mes chimères en graines Oh ce n’était pas tant pour maîtriser l’ennui Que pour combattre mieux au centre de l’arène Cette pause imposée, cette mort au divan Alors que de l’attente il survient une peine Je luttais à l’envi pour vaincre de ma veine Oui, j’espérais ainsi ! Car l’espoir est vivant !
Vois-tu c’était un peu comme un cérémonial Un rituel acquis pour taxer l’habitude Non ! J’exaltais plutôt d’un engouement génial Mon âme à replier ainsi sa solitude ! Oh je l’ai vu passer ce triste mémorial On aurait dit un marbre agencé sur l’étude Mais j’inscrivais, hardie, de mon sceau seigneurial Chaque lettre rougie du poinçon Certitude !
J’imaginais parfois tes courbures de mâle Aujourd’hui je le sais, ce n’était pas les tiennes Que je dessinais là, à vrai dire assez mal Mais elles séduisaient les cambrures des miennes Oui j’esquissais l’amour ! Que m’aurait-il fallu Sinon pour mieux le voir, qu’ainsi je l’entretienne Au filet de mes pieds qui toujours les soutiennent Par ces lettres galbées qu’à présent tu as lues
Jamais je n’ai cessé d’entretenir la foi Que ces messages-là trouveraient partenaire Un intime lecteur enflammé par mes doigts Ou bien était-ce moi qui brûlais de ton air ? Oh, comment te le dire, à toi, que chaque fois Que bouillonnait mon sang d’une encre mercenaire Je précédais un ’’Nous’’ du paraphe ’’Je crois !’’ Pour chauffer de ferveur mon feuillet visionnaire !
Je n’aurais jamais cru le prier aussi bas Cet esprit pour qu’il dure à révéler mon rêve Quand ma tête penchée sur chaque alinéa S’épuisait jusqu’à l’aube à faire qu’il s’élève Ce n’étaient que des mots, fragiles, délicats Diront les maldisants, ces Adam sans leur Eve Mais sauront-ils un jour qu’à l’orée d’une trêve Lors que tu m’apparus, j’étais à toi… déjà !