Elle est comme un bouquet de dentelle gracile Une gerbe de soie, un coton malicieux Elle est la joie d’aimer, la larme à l’œil facile Elle est tant, elle est tout, tout au bout de mes yeux
Elle aurait pu savoir la chaleur de mon ventre Si l'avait déposée la vie, dans ce lieu sûr Je lui aurais voué la passion qui éventre En défis astucieux les zestes des morsures
Je lui aurais offert mon suc, ma tempérance Mes idéaux promis, mes potions anti-blues Je l’aurais allaitée d’un alcool d’espérance Qu’elle aurait bu sans fin douze mois sur les douze !
Je l’aurais dorlotée, là, blottie sur mon sein Je lui aurais chanté comptines et berceuses Mais quand je la ressens peaufiner son dessein Je suis fière d’y voir ses fibres courageuses !
Je l’ai prise en chemin, dans les rues de naguère Elle avait devancé sa main dedans ma main Nous nous sommes liguées toutes deux guerre à guerre Elle a rejoint mon clan, mes rêves, mon demain
Elle me souvient tant celle que j’ai été La frêle adolescente, à la fois passionnée Sensible en son milieu, téméraire en côtés Réfléchie et sensée, pourtant irraisonnée
Elle ressemble un peu à l’organdi fébrile Qui tremblote de froid, qui s’effraie pour un rien C’est pourquoi de son corps où pointe son nombril J’ai lacé un cordon qui s'amourache au mien !
Et ce nœud qu’elle étreint me rappelle ma mère Qui m’entraîna jadis à sa force de femme ! Guerrière flamboyante à la fauve crinière Elle attise mon feu aux flammes de son âme !
Elle n’a pas mon sang, mais elle est de mon cœur Tout comme mes enfants, elle est de ma famille Lorsque dans ma retraite elle ouvrit en vainqueur Le bastion de nos nuits, je la reçus pour fille !
Entendez-vous tinter le carillon qui danse ? Elle en a déréglé le temps et sa notion Des aiguilles du sien, au mien qui s’en balance La trotteuse en tic tac, bat sur nos deux prénoms !