Si ma plume s’ensaigne écorchée par le joug D’une amarre encordée aux bleus de mes déveines Dois-je encore pleurer, mains jointes à genoux Ou dois-je écarteler mes doigts sous l’infortune D’une obole en sou franc, l’arme de la fortune En devrais-je payer aussi mes maux sonneurs ? Plus rien ne vaudra mieux que mes lettres d’honneur Pour le prix de ma peine !
Ö Mer que je chantais autrefois à mes pieds Quand bondissait le chœur de marines nouvelles Me faut-il agonir, me faut-il expier Au replet d’une coque où s’ancre ma démence ? Tandis que se poursuit le rythme tambourin De ma galère offerte à ce Port de clémence Je veux troquer l’épice à un frais romarin Au quai des caravelles
Vous vaisseaux corrompus, lâchez un peu de lest Ecopez les sanglots de ma morne saison Voyez de l’horizon désarçonné par l’Est Mes artères vibrant sur mes ailes étales Lors que se plie mon mât en position fœtale En boulet de chagrin, nœud coulant de misère Le corps fou hisse haut la voile des faux airs Pour gagner l’irraison !
Prenez tout sans compter ! Et ma peur et ma rage ! Mon gouvernail tremblant n’avouera son sabord Ni la soif de survivre ou la faim de l’orage Ne lâcheront le cap de mes rives alertes ! Avant que ce forban n’assaille tout mon sang Je ramerai plus fort sur cette houle inerte Et la rumeur fut-elle en multiple de Cent Ne tiendra pas mon Nord !
Ce gué infranchissable est mon fier attribut Pensez-vous l’idéel sous des eaux plus propices ? Fi d’un conditionnel quand le présent a bu Le sel en démesure en goulées d’évidence Qu’il a déjà conquis sur l’onde providence Le lever face aux vents du pavillon d’espoir Sur lequel s’est gravée l’emblème du vouloir : ‘’Il n’est vain sacrifice !’’
Je noierai ma douleur sous ces flots en furie Tel un bourgeon éclot de revoir le soleil Je pendrai haut et court le moindre des houris Soufflerait la victoire aux escadres d’épaves Que de mon ciel meurtri par les feux de l’aurore Une harpe se bande au long de son étrave Et démine l’atoll de mes futurs trésors Pour fuir le grand sommeil !