Je préfère mon doute à votre certitude. Est-ce un tort, est-ce un bien, qui me l’interdira ? Je ne sais retenir la soif de l’altitude Qui m’entraîne au vertige, ou vers l’œil d’un cobra.
Je préfère oublier pour avoir à surprendre Ce que prétentieux pensent déjà conquis ; Pénétrer en tout lieu, insouciante et tendre, Plus nue au nouveau jour, qu’au jour où je naquis.
Je me suis accordé le préfixe d’ignare Choisi de volonté parmi tous ces requins, Ou fanfarons bornés, que la gloire accapare, Mais qui s’enferment, las, aux océans turquins.
Lorsque chaque matin ma paupière s’éveille, Elle recoud le vent, les forêts, les oiseaux ; Je perçois de tout temps l’indicible merveille D’être modeste goutte embrassant les roseaux.
Je n’ai pas de savoir. Je n’ai que ma mémoire Riche des percussions d’un délicat tambour Qui se cogne à ma peau, dont la musique à boire Est cette découverte offerte par l’amour.
Car c’est lui qui nourrit ! Le grand ! L’indiscutable ! Hélas, il peut mourir au milieu des charniers De squelettes imbus qui n'étalent sur table Que science jugeant les autres bons derniers.
C’est pourquoi je m’amuse à coucher ma cervelle Dans un nid de désirs, tout en la recoiffant Avec un peigne à vivre, ainsi qu’aube nouvelle Avide d’éclater son grand rire d’enfant.