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Ambre DELUNE

Reine Essence (duo avec Chimay Orduval)

Je t'aimais, le sais-tu, dans les plaines d'Assouan
Dans les vapeurs migrées de jungles halogènes
Dans les heures saignées à l'opium de nos gènes
Je t'aimais au shilom de ton encre Safran !!

Au coeur de la toundra, dans les déserts glaciaires
Voilés par la fureur de blizzards si épais
Que les flocons flambaient d'un désir incendiaire,
Sous un sorbet de neige et de gel, je t'aimais.

Ton épice en mon sein comme sel aux morsures
Tes margelles d'osier à tes mèches d'iode
Oh combien je prisais d'en lécher les blessures
Pour fumer la frayeur de ton âme en exode !

Combien de sables gris n'avons-nous enivrés
Quand nous étions dauphins échoués dans nos songes
Combien de cieux cajuns et de langueurs poivrées
A l'heure où dans les ports l'ombre des mâts s'allonge ?

Je t’aimais le sais-tu dans les salons antiques
Dans nos écrits feutrés de jeux épistolaires
Telle George à Alfred, rusant les sémantiques
Je t'aimais dans les plis des plumes angulaires !

Et si quelques bémols d'une valse musette
Nous laissaient quelquefois l'un de l'autre orphelins,
Nos encriers saignaient le temps d'une grisette,
Tout n'était qu'un prétexte à filer le satin.

Et nos cris et mes pleurs et tes nages indiennes
Refluant les ressacs, à bord d'un Nautil'Us
Emportaient nos écarts, diérèse° et hiatus
Sur un radeau moulu de laves obsidiennes

Un volet ajouré comme un château de cartes
Tatouait sur tes reins nos gravures anciennes
Et nous nous retrouvions à l'abri des persiennes,
Hors de jet des clameurs aux silences opaques.

Je t'aimais, le sais-tu, avant notre naissance
Avant que nos deux noms sur les fronts baptismaux
Ne gravent de leur sang les pignons de nos maux !
Je t'aime comme on aime en toute âme et constance !

Je t'aimais, tu le sais, avant qu'Eve eut naissance
Et le sérum en nous précédait le venin,
La réconciliation précédait le chagrin,
Je t'aime comme on aime en toute âme et constance