Je viens de ce pays à l’enfance fracassée Où frémissent des parfums de promesse d’été Je viens de ce pays à franges de méditerranée Où se disperse l’arôme tendre de criques uniques Entre eucalyptus iode et lentisques aromatiques Je viens de ce pays à bourrasques de soleil Où s’enracinent essences rares à parfumer le ciel Où s’alourdissent fruits luxuriants gorgés de miel
Je l’ai vu Kabyle dans l’eau claire des fontaines Dans les mains rougies des laveuses de laine Je l’ai bu sirop sève du figuier de Barbarie Menthe mousse cérémonial au parfum d’Arabie
Je l’ai vu Mitidja grenier à blé orangers en vergers Je l’ai vu Casbah terrasses et venelles en cascades Je l’ai su jardin mandarine et treille de glycine Jasmin en grappes épicées cannelle en pincée
Je l’ai vu doux danser les sarabandes en essaim Je l’ai vu noir frémir d’effroi au soir de la Toussaint Je l’ai vu pourpre au fracas des balles mortel dard Bleu d’encre marine le soir du grand départ
Je viens de ce pays à maléfices sombres Embrasé souillé aux frénétiques livré D’âmes errantes peuplé ultimes ombres Grenade doucereuse à l’odeur de chairs brûlées Je viens de ce pays qui s‘effrite sable en mille grains Qui glisse poussière cendre entre mes mains
Mais il suffit d’une mélopée d’un parfum Pour qu’il revienne Pour qu‘il me reprenne De lui tout entier j’ai faim
Pour moi seule je le veux Cerné de bleu S’éblouissant Du blanc de ses façades Du galbe de ses arcades S’évanouissant Concentré de souvenirs Au lent des voyages immobiles Au vide des retours impossibles