Je m’assieds face à l’eau sur l’herbe fraîche et drue, Sous l’abri de lourds arbres qui me cachent la nue, Et je ne pense à rien, et je me laisse aller, J’oublie l’heure et la vie, je n’ai qu’à exister.
Je me sens bien ici, c’est un endroit paisible ; Le bonheur est présent ; il est d’ailleurs visible Lorsque la chance fait, en certains doux moments, Surgir un grandiose et rare événement :
Le bouton d’or frémit, la libellule danse, Le ragondin pataud plonge avec élégance, Dans l’eau hyaline ondoient l’anguille et le gardon Que de la rive épie l’œil rouge du héron…
Une barque apparaît, transportant une vache, Une loutre se baigne en lissant sa moustache, La famille colvert barbote en palabrant Sous un frêne têtard qu’un pic noir va frappant…
La bleutée rosalie squatte un vieux tronc noueux, Le cuivré des marais reluit en tons rouilleux… Et moi, maraboutée par ce havre divin, Je m’imprègne et me grise du marais poitevin…
Mais que sont ces remous, noirs sous le flot fuyant ? Pourquoi ce clapotis est-il aussi bruyant ? D’où vient, serrant mon cœur, ce furieux désarroi ? Comment, si seule ici …… puis-je entendre ta voix ?
(Extrait du recueil « TOUTES SORTES D'AMOUR DEVIENNENT POÉSIE »)