Ce que l’on voit de mon jardin
Quelle joie de pouvoir chaque jour admirer
Cette verte nature en tableaux colorés,
Ce grand panorama étalé dans l’espace,
Ces larges horizons que le regard embrasse
Qui, partant à l’orient du Saint Barthélemy,
Dépasse à l’occident le haut Pic du Midi
Et joint, à travers les hauteurs vallonnées,
Mon modeste jardin aux grandes Pyrénées !
La vue plonge d’abord jusqu’au petit ruisseau
Coulant là-bas caché en un secret berceau
Que trahit le trait vert d’une haie naturelle
D’arbres et d’arbrisseaux placés en ribambelle,
Puis monte à travers prés, forêts et champs de blés,
Gravissant le coteau en un doux modelé.
Puis encore un vallon et une autre colline
Suivis encore d’autres que plus loin l’on devine.
Les crêtes recouvertes de leur verte toison
Forment un enchaînement de petits horizons
Et moutonnent ainsi jusqu’à perte de vue,
Ondoyantes vagues d’une mer suspendue.
Sortant des frondaisons on aperçoit parfois
Les tours d’un châtelet surmontées d’une croix,
Quelques fermes isolées, le clocher d’une église,
Aux calmes carillons apportés par la brise,
Et ces quelque logis humanisent l’endroit.
L’ocre brun des guérets, les tuiles rouges des toits,
Le vert profond des bois, le vert vif des pâtures
Forme avec la blondeur des blés une peinture
Idéale et naïve, disposant au repos.
Tout est calme à l’instar des placides troupeaux
Paissant tranquillement le long des vertes pentes ;
La nature entière paisible nous enchante.
Mais au-dessus des champs, des prés et des forêts,
S’arrête la douceur et soudain apparaît,
Remplaçant tout à coup l’ambiance pastorale,
D’orgueilleuses cimes, géantes colossales,
Royaume des vents, de la neige et du roc
Et ce contraste crée un véritable choc !
Notre âme se nourrit lorsque nos yeux contemplent
Cette vue de grandeur, large, libre et ample
Découvrant, éblouis, ces monts audacieux,
Sublime couronne de sommets glorieux,
Jaillissant de l’écrin de la douce campagne,
La chaîne des hauts pics, le rempart de l’Espagne !