Le céleste jardin
Mortellement blessé d’un coup qui le frappa,
Un homme était passé de la vie au trépas.
Délaissant au sol son enveloppe charnelle,
Son âme éthérée prit, - ainsi d’un grand coup d’aile
S’envolent les oiseaux -, son essor vers les cieux,
Ses contrées de lumière et ses champs radieux.
Il était partagé de sentiments contraires
En laissant d’un côté tous les siens en arrière,
Ses chers parents restés au sein du monde obscur
Et la joie de vibrer dans cet univers pur
Où il reconnaissait d’autres âmes amies,
Jadis oubliées par sa mémoire endormie.
Il sentait comme un vague arc en ciel en son cœur.
Dans la lumière intense et pleine de douceur,
Il perçut près de lui une noble présence
Empreinte de bonté, pleine de bienveillance
Paraissant le guider. Il découvrit soudain
A sa grande surprise un très vaste jardin
Où toute la flore jusqu’au moindre brin d’herbe
Semblait lumineuse, féérique et superbe !
Son regard parcouru ce tableau captivant
D’une nature où tout paraissait si vivant,
Composée par une très subtile matière
Transparente et limpide ainsi que la lumière.
Une autre chose aussi grandement le surprit
Sur la droite on voyait un côté tout fleuri
Plein de roses et de lys, de lilas, de glycines,
Des massifs pleins de fleurs d’une harmonie divine
Quand à gauche on trouvait un terrain d’abandon,
Triste enchevêtrement d’orties et de chardons,
Parsemé de chiendent et constellé de ronces.
A sa question muette il eut une réponse,
En lui-même une voix tout à coup s’exprimait :
« Il pousse en ce jardin ce que tu as semé.
Ces graines que tu as dans ta vie dispersées
Ce sont tes sentiments, tes actions, tes pensées
Tous les actes commis au cours de ton passé
Parfois très consciemment, parfois sans y penser.
Tu vois les résultats de tes propres semences
Qui ont poussé ici au sein d’un parc immense.
Quand ils furent néfastes, quand ils furent mauvais,
C’est au côté gauche qu’on les voit s’élever,
Mais lorsqu’ils furent bons, généreux, magnanimes,
A droite ils ont formé ces parterres sublimes,
Ce jardin coloré aux parfums merveilleux,
Céleste Éden menant au Royaume des Cieux.»