A la première aurore, Quand le soleil s’étire sur l’horizon, Cueillerais-tu sur mes lèvres La rosée de mes songes ? Il te faudra, mon amour, Tant d’impudique audace Pour écarter les voiles Qui me séparent du jour. Je sais ta main tremblante Et l'eau bleue de tes yeux. Je sais ce rose, Masque attendrissant, Qui habille ta joue. Contre un portail, Un battement sourd, Comme un battoir, Régulier et puissant, Scande mon dernier rêve. Pourquoi est-il soudain précipité ? Est-ce ton cœur ému Craignant un sursis trop court Entre ton baiser suspendu Et le lever du jour ? Hâte-toi, mon amant, mon amour, Vois, les premiers rayons Caressent déjà Les haies et l’herbe perlée. Bientôt, la chambre perdra ses mystères Et mon regard dans un embrun Te surprendra Dans ce geste arrêté Qui était un baiser. S’il le fallait, Je retiendrais à jamais Le soleil de cette aurore, Pour goûter, Enfin et encore La ferveur de tes lèvres, Prière sur les miennes. Mais le tisserand de la nuit A remis son ouvrage fini Dans les mains magiciennes De la leste dentellière. Ses doigts experts Cousent l’ourlet du jour Et l’instant furtif s’enfuit. Comme toujours, Le soleil luit.