Poète au visage ténébreux, aux traits émaciés Par les nuits sans sommeil, nuits sombres Laisse-moi donc effleurer d’un doigt léger Chaque sillon creusé sur tes joues. Tu frémis, distrait par cette intruse Qui te ravit aux songes d’Eternité. Elle ignore qu’elle frôle des mystères Où tu te perds si souvent. Elle joue Une sonate au clair de mers insondables. Poète, il fait gel à cœur fendre Quand tu t’égares sur des rives lointaines. Tes yeux de glace s’abandonnent Aux rimes chaudes et versent des larmes De soleil noir que les mésanges aiment boire. Laisse-moi pénétrer ces contrées secrètes Sans cartes et à tir d’âme, ces forêts denses Où le chant des oiseaux est un cri d’amour. De ta voix fêlée par des nuits à hurler, Tu appelles une amante que tu connus un jour Et que je ne connais pas. Tu souris un instant. Est-ce ma caresse présente ou son souffle éteint Qui déplisse ton front ? Je découvre la haine. Poète, au regard à nouveau fuyant, tu t’exiles Dans ces mondes où tu es seul, éternellement. Tu refermes les battants du silence et disparaît Sous ma main qui tremble maintenant. Je suis sur la banquise de tes songes. J’ai froid Comme dans la mort ou dans l’oubli. Ma caresse s’enfonce en tes crevasses cachées. Ton visage foudroyé se tord : un éclair De folie entre tes dents illumine, un court instant, Pour moi, rien que pour moi, l’Eternité. Tu m’as ouvert les portes de tes enfers. Tu m’as montré ta Gouve en un baiser.