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Arwen GERNAK

L’hiver au cœur.

Au pied d’un tumulus oublié par les hommes,
La campagne étend sa plaine morne et grise.
Les arbres ont tout perdu et même leur chemise ;
Au dessus du ruisseau sans voix pour murmurer,
Tout enfermé qu’il est sous son manteau de glace,
De fins amas de brumes ressemblent à des fantômes

Sur la berge fangeuse et la terre figée
On entrevoit encore parfois de vagues traces.
Qui passa donc par là en ces heures ternes et fades ?

Etait-ce un amoureux perdu ou une enfant
Cherchant un oiseau bleu pour hanter ses nuits froides ?
L’absence et le silence tirent de leur néant
Les plus belles images dont ma tête peut rêver.

Aucune voix humaine ne se fait assez vive
Pour démentir tous les tableaux ébauchés,
Dans mon sombre regard sur l’humaine dérive.

Comment peut-on ainsi parjurer ses racines
Qui pouvaient nous mener aux portes du sublime ?
Comment peut-on ainsi gommer des origines
Qui comportaient en elles les honneurs et les crimes ?

Mais c’est tôt oublier que l’homme indompté,
Par de trop beaux démons, se laisse toujours prendre.
Ce piège reste tendu à l’enfant et à l’aimé.
Ma vision ne peut rallumer toute cendre.

Le ciel est lourd et le brouillard est dense. L’hiver
Reste au cœur du village. Mais toujours la terre palabre :
Elle hurle qu’il y fut des amants qui s’aimèrent
Et se mirèrent, en cette eau, leurs traits encore glabres.

C’est alors que je vis une pierre, silex pur et noir,
Que de tout ton amour jeune et limpide et doux
Tu me donnas un jour ou bien plutôt un soir
Où mon cœur, lui aussi, s’engluait dans de sombres remous.

Ma main la ramassa et d’un geste la lance.
Et revoilà que l’eau murmure et ranime l’espoir
Une force soudaine gomme ainsi cette offense
Rendant à la nature ses couleurs et ses fards..
Ce monde n’attendait-il que nos deux âmes
Pour que la vie retrouve toute sa flamme.


13-12-05