Quand nous sommes affligés de grands déplaisirs, On ne souhaite qu'allègement de nos soupirs Et cherchons le bouc qui deviendrait la cause Des douleurs qui nous assaillent sans nulle pause. Jugé coupable est celui qui, en ces moments, Demande la patience des cours d'eau lents Nous nous tournons donc vers la Vertu, ce bel ange, Lui crions : « Pourquoi me laisser dans cette fange ? Quand j'aspire à l'Amour, promesse de bonheur, Tu me laisses, seul, dépérir dans mon malheur. »
Alors tournons-nous le dos à l'ange et le Vice, Accourt: l'affable démon ouvre ses bras complices Et promet d'ôter l'insoutenable fardeau Qui accable l'échine et fait courber le dos. Alors nous lui tendons la main, d'impatience. Il offre des plaisirs que ne donnent la science.
Et nous croyons allégé le poids qui repose Lourdement sur nos épaules et nous impose La torpeur. Mais sitôt qu'il nous a pris la main, Il s'agrippe à nos bras, et ce démon mesquin, Insidieusement, dans le coeur insinue Ses longs doigts, nous brise les reins et sous la nue Nous laisse pleurer, abattu et pantelant. Seul Atlas pourrait soutenir, sur notre flanc, Le faix écrasant notre si pitoyable être.
Et, dans l'Espérance que ne nous envoie paitre La Vertu, nous la supplions et l'implorons De nous redonner patience et vigueur de tronc !