Soldat preux et beau mire cette ombre au miroir Son œil souillé te jugera jusqu'au champ de gloire Ce reflet pourfendu est la gueule naguère au trépas Qui parlerait plus clair si la bouche n'y manquait pas
Ces lettres que vous m'adressiez depuis la poudrière M'ont laissé ces vers que je récite le soir en prière "mon cœur s'ennuie de vous revoir sitôt victorieux Car ma raison s'égare depuis l'aube de nos adieux" Mais voilà le temps a passé les livres ont jaunis Et les bombes se sont tues et la guerre est finie Nos gamins sont rentrés boiteux ou bien farouche Labourant aux champs l'airain de nos cartouches
Sous des ombres spectrales c'est la vie qui renaît Annonçant un timide espoir de derrière les genêts Les boyaux et les sillons sont des tombes de boue Où s’ordonnent ces corps roide qui dorment debout
Artilleur triste et pâle tu te souviendras sans cesse Comme Verdun se souvient encore de ta jeunesse Tu marchais vers le front azuré de ta capote neuve Ne sachant pas que là-haut on crève pour la preuve
Les souvenirs de l'ennemi dont l'ordre anime la botte D'un enfant famélique au sein de sa mère qui sanglote De ces compagnons d'armes qui tombèrent en révérence Font ce jour fleurir à nos boutonnières le bleuet de France