Nos moeurs sont aujourd'hui d'une âpreté cruelle À l'égard des sapins, des sapins de Noël. Épié toute l'année d'un regard maternel, Le conifère leurré nous prend pour ses fidèles.
Hélas jeune sapin, toi qui parmi tes frères Repose dans la montagne, heureux et sédentaire Ô que n'as-tu conscience qu'une fois venu l'hiver Nous viendrons te chercher pour te sortir de terre.
Alors dévoilé aux regards convoiteurs Des familles chrétiennes, des passants baladeurs, On juge ta parure, on mesure ta hauteur, On paie le fleuriste, tu change de possesseur.
Te voilà maintenant, dans un foyer au chaud, Attraction principale de maîtres immoraux. Ils te vantent beaucoup, te flattent avec brio, Et ils te couvrent même d'écharpes et de joyaux.
Vêtu comme déesse et traité comme celle-là, Tu couves des offrandes, et en oublies les bois Où jadis tu vivais, tranquille et sans effrois. Mais hélas de cela, rien est qui durera.