La fête foraine
Le mail qui d’ordinaire accueille les badauds
Rugissait ce soir-là de la fête foraine,
Evènement perçu par moi comme un fléau
Mais je m’étais laissé emmener à ta traîne.
De platane en platane avaient été juchées,
En festons colorés, des guirlandes d’ampoules
Et des rampes de spots, sur les stands, accrochées,
Flambaient de mille feux pour fasciner la foule.
Les sirènes aiguës, les pétards des tireurs,
Le tintouin dissonant des jeux électroniques,
Les harangues poussées par les bonimenteurs
Déballaient leur puissant concert cacophonique.
De confuses odeurs de brochettes d’abats,
De pralines sucrées, de bonbons, de friture,
De gaufres, de guimauve et de barbe à papa
Tourmentaient les gourmands d’une douce torture.
Nous marchions, bousculés par le monde oppressant,
De mon bras, j’enlaçais tendrement ton épaule,
Heureux de m’afficher au regard des passants,
De ton petit ami, fier de tenir le rôle.
Roués et amusés, quand nous sommes montés
Dans la folle embardée d’une auto tamponneuse,
Je sentais près de moi tes seins persécutés
Et ta cuisse presser ma cuisse questionneuse.
Dans la chenille ensuite où nous fûmes casés,
J’ai songé à bénir la force centrifuge
Qui plaquait contre moi ton corps dynamisé,
T’obligeant à me prendre, enjouée, pour refuge.
Tes cheveux chatouillaient mon nez en tapinois
Et ton rire emplissait ma tête bourdonnante,
Il résonne toujours, depuis, ce rire en moi
Comme une mélodie précieuse et entraînante.