Dans la cour de scrap Y avait un gros char chromé Qu'y avait l'air ben fatigué D'avoir tant et tant voyagé.
Son propriétaire, par ailleurs charmant, Était vendeur de bebelles pour enfants. Rose manipulateur d'innocents parents Il leur vendait de tout via Leur grouillante marmaille.
Oui c'était un requin rose À l'allure d'un tout petit dauphin gris Aux larges et redondantes bretelle rouges Avec au cou une chic et discrète boucle noire.
Quand il arrivait par un beau matin Ou un désouvré après-midi Ou une ennuyante et longue soirée, Tout de suite il savait (Armand qu'il s'appelait) Qu'il était arrivé au bon moment, Qu'il venait voir les belles mamans Lasses de tricoter, lasses de placotter.
C'est alors qu'il ouvrait son immense coffre Qui tout de suite dégageait ses parfums De si proches déjà joies puériles De si fortes sensations juvéniles.
Armand était là, le vendeur de ballounes Aux couleurs arc-en-ciel Avec chacune un bout de corde Qu'il donnait aux enfants Pour que ne s'enfuient pas leurs rêves Qui ne tenaient qu'à un fil.
Oui Armand vendait du vent Enrobé d'une mince et fragile pellicule Qui rose bleue jaune ou rouge Faisait oublier l'important L'invisible dedans.
Parfois bien sûr arrivait le méchant Le taquin rigolo le tata Qui d'un malin coup d'aiguille Faisait en trombe disparaître Cette magnifique mais si vite défunte sphère.
Ainsi est un peu beaucoup le monde d'aujourd'hui Monde d'adultes encore enfants Qui aujourd'hui encore veulent leurs Armand Marchands de ballounes et d'invisible vent.