Cours sans te retourner
"Cours sans te retourner, ne te détourne pas,
Contre les aboiements des chiens loups sur tes pas,
Qu'il fasse chaud ou froid, entre dans l'eau et nage" ;
Un gamin de huit ans, tout seul contre la rage.
Imaginez ce père en son dernier instant :
Il va se sacrifier pour que vive l'enfant
Qui, lui, se sauve en pleurs en entendant les balles
Des soldats allemands l'abattre dans des râles.
Marches dans les forêts, sous la neige et le vent
Et quémandant du pain, travail ou vêtement ;
Bien sûr trouvant parfois une âme charitable
En cachant qu'il est Juif pour être à une table.
Sans jamais rechigner, travaillant comme un grand
Et toujours un sourire en ce jeune être errant,
Allant de ferme en ferme à offrir ses services ;
A cet âge Mon D-ieu qui résiste aux sévices ?
Il a changé de nom, pris un prénom chrétien,
Le fait croire partout, une croix à la main,
Devant le protéger, offerte par une sainte ;
Et partout il se cache et sans nul pleur ni plainte.
Bien sûr des cauchemars, appelant sa maman !
Caché dans des recoins du barbare allemand
Et, même pris par eux, il se sauve et s'échappe,
Qui peut donc résister sans tomber dans leur trappe ?
Et il le fait tant croire en cette protection
Qu'il se décrit chrétien et fait sa "communion",
Se complait en ce rôle et y trouve un refuge,
Qui face à ce déluge oserait être juge ?
Accident de travail, il en perd une main ;
Le voyant circoncis, un salaud médecin
S'en va le dénoncer et c'est encor la fuite
Mais il échappe à tout, fusillade et poursuite.
Ces bribes ne sont rien du courage enfantin :
Face aux crimes nazis, ce beau film nous étreint ;
Honte à la bête immonde, honte à qui se dit homme
Et qui a laissé faire ou Président ou gnome.
Et s'en étant sorti et c'est miraculeux,
Il a écrit un livre, aujourd'hui il est vieux ;
"N'oublie pas tu es Juif" lui avait dit son père (1),
Il vit en Israël en père et en grand-père.
(1) Avant de mourir sous les balles de soldats allemands, pour détourner l'attention et sauver son fils, il lui dit :
" Tu dois rester vivant Srulik, mais n’oublie jamais que tu es Juif"
Mardi 28 Janvier 2020
Sur le très beau film, en titre de ce texte, émouvant de vérité, tellement lucide de l'acharnement nazi contre tout ce qui était juif adulte ou enfant.
"Cours sans te retourner" un livre d'Uri Orlev sur l'histoire d'Uri Friedman, ce gosse en son drame d'enfant, sous la furie nazie et tellement bien décrite en ce film.
