Deux visages de la plage, Joueurs de cartes
Pendant que sur la mer, dans son déchaînement,
Un surfeur, sainement, caracole ou s'écarte,
Il faut voir au café, en son enfermement,
Un joueur impatient, triturer une carte.
Imaginez qu'ici, du printemps à l'hiver,
Ne sachant profiter des beautés de la mer,
Ils sont là, attablés, tout au long de l'année,
À jouer au poker pendant une journée !
Mon D-ieu qu'ils sont à plaindre, en ce seul horizon,
Quand le mien est au loin, quelque soit la saison ;
Savent-ils rêver, sinon de l'éphémère
D'une partie perdue ou gagnée en chimère ?
À ma gauche la houle, en sa folle splendeur,
Chevauche monts et vals, irisés de blancheur ;
Et à ma droite ils jouent, en crispant leur visage,
N'ayant que rouge et noir pour tons de paysage.
Là nagent des baigneurs, trempés d'eau et de sel,
En mouvements gracieux, sous la voûte du ciel ;
Seule ici la sueur inonde leurs aisselles,
Ils en ont oublié jusqu'aux vols d'hirondelles.
Et, quand il va rentrer, le soir en sa maison,
Celui qui a perdu, sorti de sa prison,
Ira-t-il regretter son argent qui s'envole
Ou tout ce temps perdu, esclave d'une idole ?
Peut-il imaginer le bonheur de celui
Qui a aimé le jour et puis s'endort la nuit,
En rêvant apaisé aux coins de la nature,
Gardés au fond des yeux, en toile de peinture ?
30 Janvier 2009
