L'âme est un violon qui chante sa complainte A travers l'air glacé des matinées d'hiver Le son est pur et doux nostalgique est la plainte Qu'il tire des flocons et des cristaux solaires
La brume a déroulé ses rubans de coton Les vagues des glaciers submergent les glacières Et bientôt guidée par l'étrange partition La rigueur hivernale ouvre le frigidaire
Les cordes chatouillées par les crins de l'archet Qui riaient autrefois en éclats de lumière Ne goûtent plus le vin qui cuve dans leur chais : A rondeau esseulé sonate solitaire
Les larmes du passé sculptent des stalactites En regardant passer la buée éphémère La buée du présent s'évapore trop vite ... Le pas lent des coeurs lourds crisse sur les congères
Le menu est menu le menuet muet Pauvre valse égarée loin de ses congénères La forêt du silence est un dédale épais Où règne sans partage un chêne solitaire
C'est un chêne enchaîné qui murmure et qui songe Qui conte au vent frileux la folie des bruyères Que l'arbuste est un pin quand l'ombre le prolonge Et que parfois la nuit l'illusion exagère
L'esprit est un titan rougeoyant sous le givre Qui bout dans son carcan de gel et de matière Déjà la neige fraîche est percée de fleurs ivres Et les fruits de l'automne ont germé sous la terre
L'absurde d'un printemps dans un monde qui meurt Et pourtant cet espoir et pourtant ce ciel clair Comme un diapason dont le timbre demeure Comme une vibration qui remplit tout l'éther