C'est triste quand on perd un bon ami d'enfance, Non pas au grand nocher, mais à l'indifference, Car c'est l'éloignement qui rouille, au fond, les coeurs, Et qui verse, dans l'âme, ses fiels et ses aigreurs.
Quand l'amitié s'effrite, et le silence avale L'édifice miteux que rien plus ne ravale, La façade s'écroule au bord du désespoir, Ne laissant, du passé, qu'un facheux gouffre noir.
Pourquoi faut-il laisser ces sémonces fécondes Périr, quand elles ont des racines profondes, Qu'on a bien cultivé avec dévotion, D'écoliers en gens mûrs, avec précaution.
Nous avons dépassé l'automne de nos âges, Ensemble, nous avons fait beaucoup de voyages, En nous donnant la main, en amont, en aval; Pourqui faut-il alors y mettre un point final?
Lorsqu'on passe souvent, sur l'ardoise, l'éponge, Un nuage se lève et recouvre le songe De l'amitié qui fut et qui ne reviens pas; Mais le regret nous suit jusqu'au jour du trépas.