La bête et l'homme
Le cheval, lentement, gravissait la colline,
L'écume et la sueur coulaient de son museau,
Et couverte de sang, sa forme chevaline
Se cabrait sous les coups de l'homme. Son naseau
Tout dilaté, fumant par l'effort surhumain
Qu'il déployait, en vain pour tirer la charrue,
Chargée lourdement, par la cruelle main
De l'homme criminel, de nature bourrue.
L'animal regardait, larmes au coin des yeux,
Celui qui l'a puni pendant dix-sept années,
Qui l'a fait travailler, marcher de lieux en lieux,
Avec une cravache entre ses mais damnées.
Il voyait son bourreau et près de lui la mort,
Attendant le moment de lui trancher la vie,
Il voulut se cabrer pour éviter son sort,
Mais s'effondra devant la faucheuse ravie.
Voilà ce serviteur, fidèle à sa nature,
Couché sur cette terre, attendant Anubis,
Quelques filets de sang, que le sable sature,
Abreuvent cette terre qu'il laboura jadis.
L'animal est toujours recouvert de noblesse,
Tandis que l'homme, veule, est pris à contre-jour,
Cruel, il se croit fort, et cachant sa faiblesse,
En aigle il se revêt, mais il n'est que vautour.
Christian Cally.
1950-2001.