Là-bas
Je tisse mon cafard au milieu de ta toile…
Ô, Araignée du soir, que me veux-tu, dis-moi ?
Le Vent du Nord, pressé, s’essouffle dans ma voile ;
Hélas, il n’est plus temps… et j’ai peur… et j’ai froid.
Demain, de bon matin, en refermant la porte,
Je laisserai, là-bas, l’essence de ma vie,
Mes pas me mèneront vers l’oiseau qui m’emporte :
Il ne m’en restera qu’un amer goût d’envie :
Toi l’Aigle qui fend l’air d’une aile frémissante
En frôlant les sommets de montagne en vallée,
Ô, comme j’aimerais à la nuit finissante
M’envoler avec toi et toujours contempler
Le vert de ses prairies tissées à la quenouille,
Le bleu-blanc des cirrus, l’émeraude sapin,
L’eau claire au doux ramage où le torrent gazouille
Quand l’aube vient heurter la porte du matin,
Le blanc immaculé des neiges éternelles,
Le roc fier et aigu, la chèvre téméraire,
Et même si le loup d’une étreinte mortelle
S’en vient la dévorer, moi je verrai la Terre
Libre et sans servitude et sans aucune chaîne…
Lors, je m’élancerais vers celui qui m’attend,
Celui qui sut tarir les larmes de mes peines,
Celui qui m’a souri et qui m’aime vraiment
Du gai soleil d’été, en pluie, en vent, en neige,
Peu importe le jour, qu’importent ces tourments,
Et c’est en le suivant -vibrant à ses arpèges-
Que je roucoulerai sans me soucier d’avant…