Le jour se promenait et tardait à descendre, La source fredonnait aux portes de la nuit ; Mon cœur se languissait de ses baisers si tendres Qui butinaient mon corps, jadis, comme un beau fruit.
Il est parti voguer pour libérer la terre A bord d’un cuirassé, sans me dire au revoir, Il n’avait que vingt-ans, il allait à la guerre En me laissant ici avec mon désespoir.
Epiant, à tout moment, la porte qui, peut-être, Ramènerait enfin mon marin au long cours, J’ai attendu, en vain, guettant à ma fenêtre, Tout au bout du chemin, les pas de son retour.
A l’aube de la nuit, émergeant du silence, J’ai lancé vers le ciel un appel déchirant, Le parfum des jasmins dans ce jardin immense Flottait dans l’air du soir en bouquets envoûtants.
Adossée au vieil orme, envahie d’amertume, Je méditais sans fin... Mon désarroi fut grand Quand j’entendis au loin comme un hymne posthume Un chant d'âme éthéré que m’apportait le vent :
La Mort, un gris matin, était venue le prendre : Alors que son bateau s’apprêtait à partir, Ils ne m’ont rapporté que l’urne de ses cendres… …Où le feu a enfoui son tout dernier soupir.