Sors de ta chrysalide
Tu dors encore au sein des rondeurs maternelles
Où, tel un embryon, tu grandis en secret :
Sors de ta chrysalide, de ta citadelle,
En déchirant le dais qui te tient en ses rets.
Sors de ton fin gousset papillon éphémère,
Il est temps d’effeuiller marguerite et lilas,
Et, prenant ton essor dans le silence clair,
Tu pourras t’envoler sous la voûte des bois
Pour goûter aux prés verts et au blond des épis,
Tout le jour en volant au moment des moissons,
A l’heure où les criquets stridulent au maquis,
Sors de ta chrysalide, joli papillon !
Tu verras des ruisseaux éblouis de soleil,
Des matins de printemps et des étés semeurs,
Des couchants vultueux à la robe vermeille,
Sors de ton nid douillet, papillon moissonneur !
Dans le ciel du matin, volera l’hirondelle
Quand la vigne au levant chatoie sous la rosée,
Tous les petits cailloux feront une dentelle,
T’abritant de la pluie, tu pourras t’y poser.
Près des ruches sucrées, les abeilles butinent
Et le mer moqueur siffle un air de java,
Le pivert impatient, dans les bois, tambourine,
Sors de ta chrysalide, écoute, c’est pour toi !
Les pinsons et le paon, la forêt me l’a dit,
La mésange et la pie, et le héron huppé,
Les bouvreuils, le hibou, ont déjà fait leurs nids,
Sors de ta chrysalide et savoure l’été !...
…Te voilà indécis hors de ton alvéole,
Sèche tes ailes bleues, papillon il est temps !
Si frêle, si menu, déjà tu caracoles…
…Mais, dis-moi, à qui vais-je parler maintenant ?
