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Cyrille CHAMPAGNE

Jardin du Luxembourg (2)

Moi Xavier,
Je me suis rassis sur le même banc au Luxembourg,
J’ouvris à nouveau mon Prévert,
Mais je n’y voyais plus aucun de ses poèmes.
Suis-je devenu aveugle?
Je ne voyais plus rien, absolument rien,
Sauf, un seul visage : celui de Marie-Laure
Et c’était pour moi le plus beau de tous les poèmes!
Je refermai mon Prévert l’âme en bouillie,
Les yeux dans le vague et le front en douleur.
Je filai à la bibliothèque voisine pour y emprunter,
Vous le devenez sûrement,
Un exemplaire de Baudelaire et ses « Fleurs du mal »
Que je récitai à haute voix en rêvant à Marie-Laure :
« Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre,
Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,
Est fait pour inspirer au poète un amour
Éternel et muet ainsi que la matière.
(…)
Car j'ai, pour fasciner ces dociles amants,
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles :
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles ! »

Vous désirez connaître la fin de cette histoire?
Curieux et curieuse, va!
Oui, je suis retourné souvent au Luxembourg,
Presque quotidiennement,
Et toujours assis sur le même banc,
Me régalant des vers de Baudelaire.
Non, je n’ai jamais revu Marie-Laure,
Cette déesse croisée quarante ans auparavant.
Comment oublier pareil visage aux jolies pommettes
Et aux lèvres rouges souriantes?
Ange, femme ou déesse
Sortie tout droit des « Fleurs du mal » de Baudelaire :
« À la très chère, à la très belle
Qui remplit mon coeur de clarté,
À l'ange, à l'idole immortelle,
Salut en l'immortalité ! »