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Delphine JOUVE

Quatre heures à Chatila

Le champs est une ville en ruine,
Le témoin d'un massacre
Où les morts, sont peut être, encore,
Les plus vivants.
Trois jours et les cadavres sont toujours là,
Avec leur sang séché et noir pour seul habit de deuil,
Les étoiles pour seul linceul.
Les dépouilles attendent dans les rues
Qu'on vienne les enterrer,
Mais personne ne se présente
Et les corps restent là, dans cette multitude,
Chacun solitaire, les yeux grand ouverts
Vers le ciel dénudé.
Chatila est une forteresse
Dont les hommes sont tombés,
Ils dorment sur le sol, prostrés à jamais,
Leur corps mutilé, noir et gonflé,
Sous des essains de mouches voraces et affamées.
L'odeur de pouriture a fini par se mèler
A celle de la mort,
Trop pesant, chaotique et étouffant,
L'air chargé de ces éfluves
Reste là, impregnant jusqu'à l'eccès
Le champs de Chatila
Perdu dans son combat.