Au revoir, l'abbé Pierre
Une voix, dans la nuit, s'élève dans le froid,
Un appel au secours, hiver cinquante quatre...
Dans la neige et le vent et la mort à combattre,
Un cri monte de l'ombre, enfle, éclate et s'accroît.
S'avance un révolté sous une pèlerine,
Un visage, une barbe, une canne, un béret.
A travers le désert et l'immense forêt,
Le message est lancé par l'homme qui fascine.
Un coeur pur, généreux, bat pour les sans-logis,
Tous les déshérités, les errants de la terre.
Pour une égalité, un toit, moins de misère,
Il construira toujours des maisons, des abris.
Courant tous les pays, interpellant le monde,
Un esprit bien trempé fait trembler les puissants.
D'un flot si coléreux de mots assourdissants,
Il dit sa vérité, de sa bravoure inonde.
Dans l'amitié sans fin, Compagnons d'Emmaüs,
Semée au bon chemin qui ramène à la route,
Quand l'homme s'égarait dans la peine et le doute,
Il retrouvait le pain et puis l'amour en plus !
Pour la fraternité, contre l'indifférence,
L'injustice croissante et ses très noirs aspects
Une âme, en son repos, prie encor pour la paix,
Avec indignité, dénonce la souffrance.
Une main qui se tend, geste de charité,
Vers les plus malheureux, enfants de la détresse,
Et l'autre main tenant, ainsi qu'une caresse,
Le grand appel de Dieu dans son infinité !
L'avenir montrera qu'un mot, "persévérance",
Est plus fort que la mort, plus grand que la pitié.
Une foi débordante, un combat d'amitié,
Ont laissé cette image à son pays de France.
Le ciel pleure, aujourd'hui, ses flocons de l'espoir
Sur celui qui rêvait d'une planète unie,
D'un éternel amour, de lumière infinie...
Ne dites pas "adieu", ce n'est qu'un "au revoir" !
