Sur le banc de la vieillesse...
Je les observe, assis, sur le banc du village,
Dans le jardin désert où, souvent, on les voit,
Venir tourner des jours, les heures et les pages
Du livre de leur vie, de ce temps d'autrefois.
Ils sont ici, chez eux, sur leur terre promise,
Dans ce berceau natal où ils se sont connus,
A l'ombre du clocher de la petite église
Pour le premier frisson du baiser ingénu.
Ils en ont arpenté des chemins de misère
Pour trouver leur soleil au bout de l'horizon,
Et marché dans la boue d'une sinistre guerre
Qui semait haine et peur, tristesse et trahison.
Les enfants ont grandi, trop vite, à toute allure,
Laissant éparpillés souvenirs et photos...
Ils reviennent, parfois , dans leur belle voiture,
Parler d'un grand voyage, en avion, en bateau.
La maison de retraite...il n'y eut rien à faire,
Quitter leur nid, un jour, les aurait trop brisés !
Tous deux, main dans la main, lentement, ils préfèrent
Marcher à petits pas, sans se brutaliser.
Jusqu'au bout de la nuit, ils resteront ensemble
Pour goûter chaque miette...il en reste si peu !
C'est vrai, de plus en plus, la voix, le geste tremblent,
Mais le coeur bat encor, le soir, au coin du feu.
Ils rêvent de jadis ! Pourtant, dans leurs prunelles,
Je vois jaillir, ourlées, des perles de nectar
Qui posent comme un miel de douceur éternelle
Sur l'amour infini de leurs derniers regards.