Ce soir j’ai poussé la porte De ce qui fut autrefois Mon chez moi
À présent je suis une étrangère Dans cette demeure que j’ai chérie Elle est toute mouillée Des pleurs de mon absence
Rien n’a changé Tout est resté là Le temps sur les objets passe Sans les marquer Mais moi j’ouvre les yeux Et les souvenirs me giflent
Ici cette statue qui me disait De l’art toutes les beautés Là ce tableau dont les couleurs Me transportaient sous d’autres cieux
Je regarde et mes yeux souffrent Ils pleurent à l’évocation De ces moments où je communiais Avec toutes ces créations
Et sur ce plancher Que mes mains ont soigné J’entends mes pas Ils résonnent doucement Comme ceux d’un voleur À la recherche de trésors
Mes livres sont toujours debout Mais de leur inutilité Ils me parlent Et du froid ils se plaignent Depuis que ma main a cessé De leur prodiguer des caresses
Je regarde tous ces objets Qui semblent animés Tant leur détresse semble grande Puis je détourne les yeux Impuissante à leur venir en aide
Et tout doucement sans bruit Je referme cette lourde porte Et j’emprunte d’un pas lent
Cette allée qui me connaît si bien Sans me retourner Les yeux à moitié fermés Pour ne pas crier