Je ne sais pourquoi, lorsque tout s'endort, J'aperçois en rêve nos vies orphelines Tomber d'un arbre aux profondes racines : Les restes effeuillés d'un idéal mort !
Ton souvenir, aussi doré qu'une prison, Cogne à mon cerveau comme à une porte Consumant lentement ce que la fièvre emporte : Les dernières étincelles de ma raison
Alors que je sombre dans un flot de douleurs Charriant avec lui toute une ère de mensonges, Celui que j'espérais, chaque nuit, dans mes songes Obstinément orne mes jours de tendres couleurs
Quand Mai revient et donne vie à nos amours Je m'égaye sous l'éclat d'un soleil d'ambre ; Le soir, Hélas ! dans l'intimité de la chambre, C'est ton ombre qui m'habite encore et toujours
Ici, pourtant, où mes yeux surplombent la mer Qui mêle ses embruns au sel de mes larmes, De ta sphère je m'évapore vers d'autres charmes Et pardonne ce silence tellement amer !
Tu restes celui que mon cœur, longtemps, aima ! Mais bien loin de cet amour en demi-teinte, La nuit ravive, à la faveur d'une étreinte Les plaisirs familiers d'Antoine et Emma.