Aux premières lueurs la Darse se réveille, Le port sent la sueur et le marché s’éveille. Les navettes des îles déversent leurs bordées, Indiens Caraïbes, alcools de bois bandé, Planteurs de Grande-Terre aux rhums arrangés Artisans de Gosier, arômes de blanc-manger…
Les odeurs d'épices, fortes et envoûtantes, S'unissent aux senteurs infiniment troublantes Des fleurs, du curry, des fruits ensoleillés. Les parfums colorés des marchés antillais Mêlent leurs nuances sans jamais se confondre Harmonie très étrange où l’on aime se fondre
Les paniers de fleurs éclatants de couleurs, Les cagettes de fruits se disputent l’honneur D'attirer l'attention des touristes, des badauds. Le jaune des citrons, le vert des melons d’eau, Et le rose clair des écailles de dorades, Rappèlent les madras des filles de Désirade
L’étal d'un poissonnier bruit de sourdes rumeurs. Langoustes et ouassous ont des sautes d'humeur. Tandis qu'un pêcheur range ses poissons vidés, Une petite vieille à la peau toute ridée, Tend sa calebasse pleine de colombo, Où surnagent gluants trois ou quatre gombos.
Assis sur un bidon, un gros marchand de fringues, Immigré d'Haïti ou bien de Saint Domingue, Observe les chalands, le regard un peu vague, En triturant inquiet ses doigts couverts de bagues. Entre deux calypsos, la voix de Bob Marley S'écoule de sonos aux allures de Harley.