Les entiers
Comment peut-on se faire si mal alors que l'amour nous soulève, nous porte, nous jette l'un contre l'autre.
On se cogne, on est maladroit, comme si on avait oublié comment faire, comme s'il fallait tout réapprendre, ou pire, comme si on avait perdu la foi.
Ainsi veut-on embrasser mais l'on mord, veut-on caresser mais l'on pince, veut-on être effleuré mais l'on se méfie de la main de l'autre, aussi douce soit-elle.
Est-il sincère ? Est-il un valet de coeur ? est-il un vagabond ? ou encore un vampire de l'amour qui déborde de nous ?
Alors comme un rempart, comme une coquille, comme un hérisson, on se resserre, on se referme, on se protège, on rejette, puis on peste, on colère, on maudit, on se torture, on se déteste de rouvrir nos propres cicatrices.
Pourtant ça perce à travers nous. On aime, c'est certain, on vibre, on désire, on enlasse, on donne tout ce qu'on peut.
Dans les yeux de l'autre, on ressent son intention de nous rendre libre de nous attacher à lui.
Mais lui-même, en son cocon rassurant, craint de perdre son Nord.
Quel gâchis !
Ainsi sont les entiers, les sensibles, les poètes, les fêlés, les blessés, les écorchés vifs, les justes.
Malgré la dureté du monde d'ici-bas qui force trop souvent aux compromis, ils cherchent encore, ils cherchent toujours, ils veulent croire qu'il existe une fin cachée, et visent à aligner leur âme d'enfant sur le souffle de l'Ange.
Ainsi les sentiments les prennent tout entier, les brûlent, les transpercent, en font des bombes d'émotions qui explosent parfois au mauvais moment, au mauvais endroit, pour rien, pour une impression floue, un mot rouge, une peur sourde.
Et pour autant que le miel coûle dans leurs veines, c’est bien l'acide qui coule au dehors, encore...
Comment peut-on se faire si mal alors que l'amour nous soulève, nous porte, nous jette les uns contre les autres.
À Sandra
[26/11/2022]