Un cerf, en héritier de l’esprit de Narcisse, Aimait à se mirer dans l’eau d’un étang clair Il admirait ses bois, grandioses appendices Qui lui poussaient au front, chaque an, après l’hiver. Rien ne se comparait à sa noble parure Selon son opinion. Il se trouvait très beau Et se voyait un peu en roi de la nature. Il se reconnaissait un unique défaut : En-dessous du cuissot, il n’aimait pas ses pattes. Il les trouvait trop fines, manquant d’épaisseur. Il se voulait athlète et, quoique délicate, La ligne de ses jambes manquait de vigueur. Un jour où, à nouveau, pour jouir de son image, Marchant dans les sous-bois, il cherchait son étang Et faisait son chemin à travers le ramage, Il aperçut au loin, un gros attroupement : Une meute de chiens, et des hommes en chasse Qui avançaient vers lui après l’avoir pisté Il se savait rapide, comme ceux de sa race, Mais il lui fallait fuir avant d’être attrapé. Ses jambes mal aimées, là, firent des miracles : Avec souplesse, puissance et agilité, Elles évitèrent mille pièges et obstacles Jusqu’au moment tragique où le cerf fut coincé, Les bois enchevêtré parmi de vils branchages. Irrémédiablement bloqué, il fut rejoint Par les chiens, victime du funeste arrimage. Faut-il dire ici la fin de la chasse ? Point ! Mais je dirais bien une sorte de morale : On peut être sauvé par la partie de soi Que l’on n’estime pas ; quant à l’issue fatale Elle nous vient souvent d’en quoi nous avons foi.