Un ragondin, au bord d’une onde propre et fraîche Où un cheval souvent venait pour s’abreuver, Se roulait dans la boue et rependait sa fange De sorte qu’on ne put plus boire à ce ruisseau. Le ragondin est niais, parfois aussi revêche. Lorsque notre cheval vint pour lui demander De mettre un terme à ce comportement étrange Ou bien d’aller ailleurs pour ne point troubler l’eau, Le gros rat se montra acariâtre et rebelle. Le cheval pour sa part, n’étant pas querelleur, Décida sur le champ qu’une tierce personne Devrait trancher ce cas de cohabitation. C’est à l’homme qu’échut d’arbitrer la querelle, Qui instantanément condamna le rongeur. Nul ne doit ignorer ce qu’un bon juge ordonne Ce fut du ragondin la dernière leçon ! Car tous les jugements sont dits exécutoires Et l’homme, s’il le faut, sait être aussi bourreau, Après qu’il ait montré toute sa réticence, Le rat dû déguerpir à grand coups de bâton. Le cheval aurait cru à la fin de l’histoire, Mais rien n’est tout à fait gratuit, et jouir de l’eau Aurait un prix… En signe de reconnaissance Le beau cheval aurait désormais un patron ! L’homme exigeait de lui d’en faire sa monture Et de pouvoir s’asseoir à l’aise sur son dos Car il se fatiguait lors de ses grands voyages Et voulait cheminer sur tout le continent ! C’était bien cher payer une magistrature. Il aurait mieux valu laisser au rat son eau, N’être jamais ainsi réduit en esclavage, Et se désaltérer dans un autre affluent.