Jette au feu tes allumettes usagées Jette à l'eau tes larmes amères Jette au vent tes illusions d'adolescent
Et ne le dis à personne
Garde pour tes rouages tes grains de sable Garde pour tes heures tes grains de poussière Garde pour tes rêves tes grains de folie
Et ne le dis à personne
Apprends le chant des ruisseaux qui polissent les pierres Apprends la saveur étrange des amours évanouies Apprends le langage des yeux que nul n'enseigne ici
Et ne le dis à personne
Crains les souvenirs troubles disparus des mémoires Crains la raison qui requiert la fougue et la force Crains la honte d'avoir été victime plutôt que bourreau
Et ne le dis à personne
Écoute la magie des confins nébuleux de la nuit Écoute le souffle plaintif du temps que rien ne retient Écoute le murmure improbable des feuilles d'automne
Et ne le dis à personne
Cherche la lumière furtive du sourire d'un passant Cherche l'haleine douce de l'enfance qui s'échappe Cherche l'incandescence des sentiments naissants
Et ne le dis à personne
Dédaigne les croyances anciennes qui noient la conscience Dédaigne le tourment né de la peur du lendemain Dédaigne le brillant le soyeux et le lisse
Et ne le dis à personne
Aime les reflets fuyants dans les miroirs brisés Aime les regards chastes posés sur un corps nu Aime la mélancolie subtile qui s'impose aux soirs pluvieux
Et ne le dis à personne
Sois cette caresse perdue adressée à un chien vagabond Sois cette prière dite par un inconnu passé dans la brume Sois ce petit caillou posé au coin d'une pierre tombale
Et ne le dis à personne D'autre Que le feu, l'eau et le vent