Il n'y avait que moi en haut de cette page Pour écrire les mots de cette longue plage Où les vagues allongées déposaient les voyages Du vent fuyant devant les voiles et les sillages.
Il n'y avait que moi sur ce sable mouillé Qu'aucune mouette blanche n'avait encore souillé, Où les ruisseaux salés couraient en vaguelettes, Où le ciel figé glaçait les ombres muettes.
Il n'y avait que moi, et toi, sur ce rivage Vague, aux contours de ton jeune visage. Toi, mon fils de la mer et des cieux ensablés, Des jours enracinés dans le pas des marées.
Il n'y avait que toi et mes rêves, vieillis, Quand j’allais longuement sur ces plages, le cœur gris, En devançant le temps vers les jours où, pour toi, Je dresserai des châteaux de sable avec toi.
Il y avait vous toutes, ô vagues innombrables, Qui avaient maintes fois porté mes rêves semblables De départs sans retour pour d’amoureux voyages Alors que je restais échoué sur vos rivages.
Mes jours abandonnés sont devenus épaves Sur le sable, pointant vers le ciel une étrave. Il n’en reste aujourd’hui que des traces discrètes Sous les années passées comme autant de tempêtes.
Il n'y avait que toi sur cette plage immense Pour me dire les mots de cette page d’enfance, Avant que disparaisse sous les vagues inlassables L'empreinte de mes rêves comme châteaux de sable.