Mots émaux...
Mes mots ne sont que de l’émail,
Pour sous le beau cacher le faux,
Peindre la vie couleur muraille,
En faisant croire à des émaux.
Mes mots ressemblent à mes amours,
Tantôt si bleu, tantôt si gris,
Virevoltant, sans trop d’humour,
Dans l’illusion de mes écrits ;
Parfois si doux, parfois amers,
Au gré des courants et des vents,
Ils se noient tous, dans cette mer,
Ou déjà baignent les suivants.
Mes mots peuvent être des caresses,
Mettant vos sens à fleur de peau,
A vous mener jusqu’à l’ivresse,
D’un doigt d’un unique tempo,
Souvent coupant, comme un diamant
Qui voudrait chantourner mes vers,
Ils s’évertuent, en vieux amants
A dire les choses à l’envers.
Ils se font miel ou bien citron,
Changeant de sens de page en page,
Passant du héros au poltron,
Ou de la messe à un corsage.
Verbe, sujet ou complément,
Echafaudage de mes phrases,
Ils me montrent tout le dément,
De l’hyperbole ou de l’emphase.
Et quelques fois, devenus fous,
Sans plus du tout de retenue,
Ils ouvriront tous les verrous,
Qui me montrent à vous presque nu.
Pierres de taille de nos murs
Qui ne servent qu’à séparer,
Côte de maille de l’armure,
Qui nous empêche de respirer ;
Mais aussi parfois si jolis,
Pour parler de nos sentiments,
De ce qu’on aime ou ce qu’on lit,
Quand on sait là que nul ne ment.
Et moi qui ne suis que poète,
Leur faisant dire, qui ou quoi,
C’est grâce à eux que de la fête,
J’en comprends mieux tous ses pourquoi !
Et de ces mots, loin d’être maux,
De leur vertu à tant de sens,
En les voyants si, optimaux,
J’en tire un peu de jouissance …