Sur ses lunettes noires Danse le pâle reflet des touches d'ivoire Troublé par quelques volutes de fumée Vapeur blafarde de tabac consumé Pour lui ne vous faites pas de peine C'est qu'un vieux jazzman
Sur son clavier de poisse jaunie Trébuchent ses doigts boursoufflés, engourdis Sa vieille carcasse voutée sur la flaque noire laquée Son gémissement et notes rauques de cordes éculées Parfois son spleen gêne C'est qu'un vieux jazzman
À chaque bouffée il infusait son poison Il s'en fout, ce piano c'est sa maison Crever ici lui ferait même plaisir C'est sa vie, il ne peut se mentir Vivement qu'on l'enferme dans sa caisse en frêne C'est qu'un vieux jazzman
Pour lui l'âge n'est qu'esthétique Il vieillit avec sa musique Il en aurait parfois chialé Mais son seul regard, c'est ses verres fumés Inexpressifs, sa romance et uniforme mais embuée
Comme les cigarettes, la musique l'aura consumé Le vieux jazzman et un meuble qu'on ne peut dépoussiérer