Mon père avait je crois un château en Espagne Que je n’ai jamais vu tout juste imaginé Dans son verger dressé comme mât de cocagne Un chêne millénaire où les oiseaux nichaient.
Grand-mère possédant le piano de Chopin Jouait des impromptus sur les lèvres du temps. Dans le jardin couraient des étranges lutins Tout me paraissait beau quand j’étais jeune enfant.
Le frère de mon père était le président D’un pays inconnu aux collines orange Sa femme commandait un grand Duché Allemand Où sous un ciel d’azur volaient mille mésanges.
Mais moi dans ce fatras d’étoiles sublimées Je n’aimais qu’une fée elle s’appelait Maman Son Amour éclairait mon rêve et ses sommets Et des comètes bleues portaient son firmament.
Mon père avait je crois un château en Espagne J’héritais sans savoir de son blason de prince Prince de ces chagrins que le vent accompagne Quand le soleil s’endort dans les bras de Rubens.
Ma vie fut difficile à pleurer tout cela Car mon père frondeur était d’un autre monde D’éclairs endimanchés et de Campanella Le galop chromatique était sa mappemonde.
Maman faisait rêver mes tendres clairs de lune Sa foi me fit franchir les plus hautes montagnes Au point d’en oublier cette immense fortune Qui m’attendait dit-on dans le Sud de l’Espagne.