Sur le poème : Je suis des bois l'hôte fidèle..., Victor Hugo, l'art d'être grand-père.
Victor Hugo Je suis des bois l'hôte fidèle, Le jardinier des sauvageons. Quand l'automne vient, l'hirondelle Me dit tout bas : "Déménageons !"
Sandipoète Et moi dans toute la nature Comme vous si vous permettez J'essaie aussi de contempler Ce qui reste de fioriture
Victor Hugo Après frimaire, après nivôse, Je vais voir si les bourgeons frais N'ont pas besoin de quelque chose Et si rien ne manque aux forêts.
Sandipoète Si vous pouviez très cher Poète Voir tout ce que nous avons fait L'humain est le plus imparfait Des vivants de cette planète
Victor Hugo Je dis aux ronces : "Croissez, vierges !" Je dis : "Embaume !" au serpolet. Je dis aux fleurs bordant les berges : "Faites avec soin votre ourlet !"
Sandipoète Et moi j'enrage de voir comme Les plantes souffrent loin de vous Elles regrettent leur cher fou Qui leur causait caché de l'homme
Victor Hugo Je surveille, entrouvrant la porte, Le vent soufflant sur la hauteur ; Car tromper sur ce qu'il apporte C'est l'usage de ce menteur.
Sandipoète Aujourd'hui que le vent m'emporte Il n'y a plus cette douceur Il ne reste devant la porte Que cette irrésistible peur
Victor Hugo Je viens dès l'aube, en diligence, Voir si rien ne fait dévier Toutes les mesures d'urgence Que prend avril contre janvier.
Sandipoète Comme vous aimiez à outrance La Nature qui s'endormait Sur tout le sol de nôtre France C'est de l'ordure désormais
Victor Hugo Tout finit, mais tout recommence, Je m'intéresse au procédé De rajeunissement immense, Vainement par l'ombre éludé.
Sandipoète Je souhaite que vienne la chance À l'humain de se réveiller Que les poètes à outrance Accentuent sur le mot aimer
Victor Hugo J'aime la broussaille mouvante, Le lierre, le lichen vermeil, Toutes les coiffures qu'invente Pour les ruines le soleil.
Sandipoète Aujourd'hui terre en décadence L'être préfère tout brûler Les plantes dans la violence Meurent dans l'immense foyer
Victor Hugo Quand mai fleuri met des panaches Aux sombres donjons mécontents, Je crie à ces vieilles ganaches : "Laissez donc faire le printemps !"
Sandipoète Après un siècle trop maussade Où l'aède n'a plus raison Remplacé par un écran fade Tout ce qui vit est en prison.