Où vont les somnambules et leurs grands sarcophages Sous la lune blafarde et ses ulcères bleus, Ils vont à l’Altacama contempler les étoiles Et les pluies de météores errant Dans les mosquées astronomiques, Puis ils iront valser sur les remparts crênelés De la maison Usher où rôdent un chat noir, Un ourang-outan baveux et un hypocondriaque, Sur les berges de la mare au diable, Ils écouteront fasciné la cantate funèbre Des crapauds buffles, Ils croiseront plus loin un sinistre cortège De beubeux bègues Imbibés de bières bien houblonnées, Ils verront Paganini et son archet d’enfer Danser la Kalinka avec sieur Lucifer, Dans la forêt des Aulnes, entendront-ils gémir Un père infortuné qui a perdu l’enfant Au milieu d’un brouillard grondant, Plus tard, ils courront s'enliser Dans la tourbière du Dartmoor Poursuivis par le molosse de Baskerville, Au château de Tiffauges, Est-ce bien le fantôme de Barbe-bleue Titubant, une lanterne à la main Qui cherche son sabre sanglant et sœur Anne ? Dans une vallée obscure, ils entendront Ezéchiel Prophétiser des ossements qui redeviennent chair. Où vont les somnambules et leurs lourds cénotaphes, Vont-ils jusqu’au Prado célébrer Picasso Ou dans les arènes taquiner les taureaux, Ou simplement sont-ils dans leur rêve versatile Comme un poème loufoque Qui se dissipe, cinoque, En fumées futiles.