Je te donnerai Tout ce que je n'ai pas Car la possession avilit toute chose, Pour toi j'appellerai Les sirènes accrochées Aux rayons irisés de la lune, Les sorcières aveugles Dont les yeux d'agate Sont enfermés Dans des coquillages fumants, Je t'apporterai la quenouille Où se tissent les cheveux des comètes.
Dans le château de verre Que je te bâtirai Tu entendras les incantations Des vierges du frimas, Les mélopées Des roses noires de l'orage Et au loin, les atroces triomphes Des Belzébuth de carnaval.
Lors des éclipses de la terre Je te lirai le conte De la mille deuxième nuit, Celui où le temps se rêve éternel Et quand du ciel déchiré Surgirons les coursiers du soleil, Laisse- moi te donner Tout ce que je n'ai pas reçu Car je ne sais qu'imiter la vie, Celle que je n'ai plus Emportée dans la valse des mortes saisons, Celle que j'aurais voulu Enfouie sous les décombres de ma naissance, Celle qu'on m'a volée En m'imposant un nom Laisse-moi te donner ma vie Car elle ne m'appartient pas.