Car chacun le devine, ILS vont tôt débarquer, Venus d’un long passé, venus pour se venger, Ces fils de l’horreur et de l’exécration Qui furent massacrés nombreux, sans rémission.
Par les pieux ancêtres de ce terne village, Immondes naufrageurs, voués aux damnations Ils piégeaient les vaisseaux alors en perdition, Les entraînaient confiants sur la côte sauvage.
Ils dépouillaient les gens de leur maigre fortune Et les exterminaient sans le moindre regret, Ainsi s’enrichissait ce peuple forcené, Leurs crimes camouflés sous l’obscure lagune.
Mais bien plus tard courut sur la lande sinistre Un vent de voix hurlant sous un grand ciel de bistre, Des bêtes affolées s’arrachaient les entrailles, Des habitants furieux se pendaient au portail.
C’était la grande peur venue on ne sait d’où Qui parcourait les bois semant la confusion, La grande peur tapie au fond des rêves flous De tous ces héritiers d’une abomination.
Car, maintenant, ils le savent, ils sont maudits, Ceux-là vont arriver dans un épais brouillard Qui rampe sur la mer comme un serpent hagard, Ils peupleront les rues quand sonnera minuit.
Ils frapperont le heurtoir dans un lourd silence Sous des nuages fuyant tous ces malvenus, Ils frapperont longtemps comme une sentence Pour que disparaisse ce village déchu.