Puis La voix humaine d’une femme ou celle d’un ange? « Mon petiot, réveille-toi! » Plus fort encore « Allez zou petiot, réveille-toi! » Mieux que la voix d’un ange C’est la voix de madame Marcek qui me tira du néant « Ma foi, tu es tout pâlot! Maigrichon fiston, Vite allons près de mes chaudrons! » C’est madame Marcek de Rosières Qui m’ouvrit ses bras et sa demeure M’accueillant comme un de ses fils Et fit de l’oiselet maigrelet Du merlot maigriot Une caille dodue et une oie bien grasse Moi, Guillaume le berger, qui n’avait que la peau et les os Mieux encore De ma triste histoire et morne existence Madame Marcek, femme de cœur tout en fleurs M’écouta Me consola Me conseilla Et lentement mais sûrement Le temps fit son œuvre… C’est à regret et grande tristesse que je quittai Cet havre de paix et de bonheur Cet éden de Rosières Pour les Pyrénées à Luchon « Va faire le plein à Luchon, mon petiot! Peut-être, y trouveras-tu le bonheur? » M’avait-elle dit avec toute l’affection d’une mère Madame Marcek…
Les semaines et les mois ont passé Moi, Guillaume le berger, je suis toujours à Luchon J’y ai déniché un travail dans une grande ferme Avec d’immenses pâturages Et mon cœur n’est plus en peine Et quelque chose me dit intérieurement Que madame Marcek a vu juste… Qu’elle avait raison de m’envoyer à Luchon… Depuis quelque temps Sur les collines voisines Une bergère du prénom de Madelon Avec sa crinière follette au vent et ses si jolis tétons Me fait rêver que mon troupeau de moutons Est un cheptel d’isards Et que moi, Guillaume le berger, je suis chamois en émoi Filant et gambadant vers elle Avec moult ritournelles et chansons « Ah! Tu danses bien Madeleine l’rigodon, Madelo T’accordes bien Madeleine du talon, Madelon. Je voudrais que la rose fût encore au rosier Et moi et ma maîtresse dans les mêmes amitiés. » Rose, rosier, Rosières… Madame Marcek avait bien raison… La belle Madelon a volé mon cœur Et je suis en train de perdre la raison et mes moutons! Perdre la boule et mes poules!