Derrière moi un cygne Me fait signe Que mes jours sont comptés…
Pourquoi ai-je fait La sourde oreille ? Pourquoi n’ai-je point saisi Au vol son message ?
Fier et orgueilleux, J’ai poursuivi ma route Tout feu tout flamme Rayant vitement de ma tête Le clair présage.
Titubant et bafouillant à qui mieux mieux Et portant la main serrée sur ma poitrine, Je m’affalai inerte sur le gazon Couvert d’épervières et d’orpin.
Où suis-je donc ? En enfer ou au paradis ? Suis-je mort ou vivant ? Je ne reconnais ni ce lieu Ni cette étrange contrée.
Puis ce vieillard à longue barbe blanche Qui se penche au-dessus de moi. -Poète, n’as-tu point entendu Le chant du cygne ? -Sire, j’ai bien aperçu le grand oiseau blanc Mais je me suis moqué de son chant.
Devant moi se pose la tourterelle Qui me fredonne sa triste complainte. Je reconnais cette voix d’outre-tombe Qui me rappelle mon lointain passé Parmi vous les humains.
Ai-je été heureux ou malheureux Dans cette vie terrestre ? Suis-je malheureux ou heureux Dans cette nouvelle vie ? Je ne serais le dire…
Je crois que je suis devenu Ce grand cygne siffleur Qui vous fait signe Mais vous ne m’écoutez guère, Vous ne m’entendez plus…